lundi 7 avril 2008

2008 - Norbert - Orphelin

Orphelin, oui nous nous sentons orphelin. Tu en aurais certainement souri Norbert toi qui n'as jamais connu la joie d'être papa. La joie, c'est vite dit!! Tu disais: "Chti qui a des enfants yé bin emmerdé avec cha! ». Pourtant tu étais le père le plus prospère de ta bourgade .
Regarde, ils sont tous là et ils pleurent, tes enfants du village et de l'Artifoire. Des enfants venus en masse te rendre une dernière visite ces derniers jours, et tous disaient qu'ils avaient perdu un monument.

Des enfants qui ont aujourd'hui le sentiment d'avoir perdu pour certains, un père, un grand père ou encore un vieil oncle. Des gens comme moi qui te connaissent depuis tout petit, à un âge auquel on croyait encore que c'était Norbert qui avait taillé la pierre Brunehaut!
Des enfants qui étaient fières de se balader dans la rue du Fort debout et de voir un p'tit bonhomme taper du cailloux et fiers aussi de dire aux gens extérieurs à notre village que c'est « no mascotte »!

Fiers également, les gens de ton époque, une époque que je n'ai pas connue. Une époque où les cliquetis chantés par les sabots des chevaux remplaçaient le bruit abasourdissant des automobiles.
Les gens se nommaient par des « noms j'tés » et ma grand mère Yvonne "Mandine "
me disait que « Chez Norbert y aveo eine bachaudé d'afants et ils l'ont pas toudis eu bel, chétéo la famille du réquin »

Fiers également les jeunes qui ont réalisés le géant à ton effigie. Un géant qui aujourd'hui doit sans nul doute se sentir orphelin.
« Mon, y m’ont fait » !! Voici ta réaction lorsque tu es tombé nez à nez avec cet être de métal et de papier mâché.
Ton village se rappelle aussi du 1er mai, date à laquelle tu venais vendre des boutons de roses rouges... Le rouge une couleur qui t'a suivi toute ta vie...

La distribution du « Drapeau rouge » était aussi au programme de ton militantisme.
Mon père me racontait souvent cette anecdote à propos de cette époque quand tu passais à la maison avec cette gazette: « Francis, j'passe pour le Drapeau rouge, mais je sais bien que vous ne le prendrez pas, par contre j'en boirai quand même une! ».

Mais pour bon nombre de gens tu es surtout le symbole de l'Artifoire.
L'Artifoire.... cela pourrait être ta définition... En effet cette fête est à la fois conviviale, familiale et son optique de toujours est de présenter le bel ouvrache.
Une festivité qui aura un goût différent maintenant que tu es parti.
Les Hollinois, le public ne verront plus leur tailleur de pierre traverser la place verte. Cet homme qui distribuait sourires, poignées de mains, gentillesses à qui venait le saluer.
On entendra plus les maximes de "no Norbert" ni ses expressions. Comme à cette dame qui t'abordait en soulignant la réussite de la foire et du soleil de plomb qui brillait sur la place. Tu lui as alors répondu: « ben oui hein Madame on a réussi, mais vous savez,y paraît que l'bon Dieu yé d'Hollain... enfin bon si y'existe! »

Fini également les désormais célèbres cérémonies d'échange de cadeaux en fin d'Artifoire.
A se demander qui de toi ou des groupes folkloriques était l'attraction du spectacle. La dernière en date est mémorable; surtout au moment de donner la petite pierre Brunehaut réalisée de tes mains. On pouvait alors t' entendre s'adresser au responsable du groupe hongrois : "Savez Monsieur c'est moi qui « l'a fait ». Ah ouai vous pouvez regarder yé marqué en d'ssous!"
Orpheline aussi l'Artifoire.

Enfin en vue de te rendre un dernier hommage, j'aimerais t'adresser une petite prière... Une prière!!?? Toi qui au ciel bleu ne voulais pas croire!!
Une prière que j'ai apprise au catéchisme de la foire aux artisans. '. Une prière écrite par un autre apôtre de ce village: Albert l'instituteur! -Monsieur Albert-!

Une prière que je lui adresse également ainsi qu'à Roger Loy, Edouard Froment et à tous les autres qui étaient là au commencement.
J'aimerais également adresser cette prière à Edith et Freddy qui se sont si bien occupés de toi..

J'invite maintenant tous les fidèles qui connaissent également cet hymne à réciter en ma compagnie ces quelques versets de Monsieur Albert:


L'aut'jour j'ai monté au clotchier, J'ai r'wettié à mes pieds,
L'villach' teot plein d'solei, J'in sus dév'nu teout gai.
In déquindant les escayers, J'ai croijé no curé:
Ia pinsé que j'buveos tell'mint j'canteos.

Moutreons fiér'mint à nos afants, L'Pierr'Brunheaut dins les camps.
Faut vir teous les jaleous, Qu'cell'pie'fait teout parteout.
Napoléon y'in veuleot bin, Mais neous in li a dit, brin!
"Ch'est ein treop biau cailleau, Qu'el pierr' Brunheaut!"

Ah, oui qu'j'aime bin d'viv' dins m'patlin, ch'tein biau villache.
Ch'tein chanc'que m'mère ia eu ses afants à Hollain.
J'éteos à l'fach que j'apperdeos déjà l'langache,
J'aveos l'accent avant d'avoir mes prinmièr's dints.
Su l'banc d'l'écol'j'peuveos apprint beaukeop d'affaires:
Les monumints, les biautés des pays visins;
Mais jé m'diseos: "ch'né pan la pein' pasqué d'sus tierre,
I n'a rien d'bin, i n'a rien d'fin si ch'n'est Hollain!"


Hollain... Hollain orphelin, Hollain qui pleure.
Hollain qui aujourd'hui a perdu son symbole..

De toutes tes expressions la plus connue à mon sens est la suivante
: « I faudrait des journées de 48h »
J'ajouterais qu'il faudrait bien plus que des journées de 48h pour t'oublier.

Merci pour tout Norbert, tu vas terriblement nous manquer... Et c'est le cœur serré que je vous dis: « adieu » Monsieur le tailleur de pierre.



RODRIGUE P0LLEZ 11/04/2008